09-01 Les Vikings en Gascogne

Publié le 8 septembre 2025 à 20:54

On a vu comment les Francs ont chassé les Wisigoths. Les Francs n’ont pas réussi à vraiment contrôler la Gascogne mais y ont introduit la vassalité. La vassalité n’est pas encore tout à fait la féodalité, mais s’en approche. Alors que le pouvoir royal disparait en Gascogne voilà que déferlent les Vikings.

 

La Gascogne, comme les territoires Francs du nord, est dévastée aux 9èmes et 10èmes siècles par les raids vikings. Dans le sud-ouest, ils ont duré plus de 200 ans. Les cartulaires des abbayes gasconnes en rapportent au milieu du 9ème siècle les attaques répétées et les nombreuses destructions.

Les cartulaires de Lescar et de Bigorre mentionnent les cités détruites lors du raid de 840 : Dax, Lescar, Oloron, Tarbes, Auch, Eauze, Saint-Lizier, Saint-Bertrand de Comminges, Lectoure, Sos, Bazas, Bayonne. En 844 une flotte Viking remonte la Garonne jusqu’à Toulouse sans parvenir à pénétrer dans la ville. Eauze est détruite par les vikings en 850 et le rôle de métropole ecclésiastique de la Gascogne est transféré à Auch.

Selon Joel Supery, chercheur à l'Université de Bordeaux, après les raids des années 840 à 844, des Vikings se seraient installés en Gascogne pendant une centaine d'années, probablement dans la zone béarnaise. Ils en auraient été chassés par une armée de Gascons et de Navarrais. Cette thèse est contestée.

En 911, le roi Charles III avait donné la Basse Seine aux "Normands", ce qui n'avait eu pour conséquence que de faire cesser les raids vikings sur la Seine, mais pas dans le sud-ouest. Les raids vikings en Aquitaine et Gascogne ne cesseront que cent ans plus tard, vers 1020.

 

C’est de cette époque que date la construction des mottes castrales. Cette pratique aurait été introduite en Gascogne par les Vikings, et copiée par les autochtones.

Nicolas Guinaudeau, dans sa thèse consacrée aux fortifications seigneuriales en Astarac, dénombre 98 mottes castrales en Astarac, nombre d’entre elles proches d’anciennes villas gallo-romaines. Le secteur de Castex offre un réseau assez dense de mottes castrales dont la mieux conservée se trouve à Sarraguzan. Il en est d’autres à Moncassin et à Aux.

La motte castrale de Sarraguzan en hiver. A gauche le cimetière du village, autrefois la basse-cour de la motte

 

Une motte castrale était constituée d'une plateforme artificielle haute de cinq à dix mètres, le plus souvent érigée en un point haut pour un grand propriétaire. A son sommet était bâtie une tour en bois, peut-être de la hauteur de deux étages. La plateforme était entourée d'une palissade de pieux de bois. Au pied de la motte se trouvait parfois une basse-cour, où se situait la maison du propriétaire qui avait fait construire la motte, et des bâtiments agricoles. La basse-cour était également entourée d'une palissade. Un fossé barrait les accès les plus vulnérables. La basse-cour servait de refuge pour les villageois dépendants de ce propriétaire.

Jean-Michel Lassure a constaté que presque toutes les mottes se situent face à l’ouest, sur le promontoire d'un coteau, toujours à proximité de lieux habités. Entre les 11èmes et 12èmes siècles beaucoup de tours originellement en bois furent remplacées, sur le lieu même, ou à proximité, par des "châteaux" seigneuriaux, en général une tour en pierres, comme le château de Monlezun en ruine, proche de Marciac.

 

A Castex, des Francs aux Vikings

Que s’est-il passé dans le futur Castex entre le 6ème siècle et le début du 9ème, les trois siècles des rois Francs ? Les armées franques, des armées de fantassins, suivaient probablement les anciennes voies romaines. Il est peu probable que le centre de la Gascogne ait eu à souffrir directement de combats. Néanmoins ces troupes se nourrissaient sans retenue sur les campagnes qu’elles traversaient.

Les ruines du château de Monlezun, près de Marciac

(carte postale ancienne)

Les trois colonies du Castex des origines se sont-elles développées ? Elles ont probablement enduré des disettes voire des famines. En l’espace de douze générations, l’origine wisigothe de certains villageois a été oubliée. Ne reste que le nom de la colonie Ginous ou Ginoux. On verra dans un prochain article comment la féodalité est arrivée dans la petite communauté.

Quant aux Vikings, il est peu probable qu’ils aient ravagé les colonies du village, mais on sait qu’ils ont brûlé l'abbaye de Saint-Sever de Rustan que l'on pouvait voir en flammes depuis les hauteurs de Castex.

La menace des Vikings, ce qu'en racontaient les rares voyageurs, devait terrifier les villageois. Or aucun refuge n’était envisageable à moins de quelques jours de marche, et ces refuges, les abbayes, étaient la cible principale des attaques. Les "notables" des petites communautés des coteaux au-dessus de l’Osse et du Bouès ont alors fait construire des mottes castrales fortifiées pour servir de refuge.

En rouge l’ancien tracé de la Ténarèze

En orange le chemin Maumus- Estampures

En jaune des chemins de desserte

En 1 l’emplacement de la colonie du Midi – En 2 la colonie de Douat

 En 3 la colonie de Ginoux – En mauve : le tuco du Charbanon

Photo aérienne de Castex datée de 1945 – IGN (l’Est est en haut, le nord à gauche)

l n’y a pas de vestige d’une motte castrale à Castex. Cela ne veut pas dire qu’aucun enclos fortifié n’a été construit.

Il semble probable que le tuco du Charbanon ait été aménagé au moins en poste de guet. Il s’agit d’un promontoire situé à peu près à mi-chemin entre les trois colonies de Castex, d’où l’on a une vue à 180° sur la plaine du Bouès, là d’où pouvait venir la menace principale.

Le tuco du Charbanon, c’est le tuco "de la cabane" ou "du cabanon". Y a-t-il eu des abris rudimentaires au 9ème siècle ? Ce n’est pas impossible. Il est possible également que des cabanes aient été édifiées plus tard pour y abriter des bêtes ou des bergers.

Inutile d’y édifier une motte de terre : elle est naturelle. Une tour de guet serait suffisante, à l’extrémité d’une enceinte-refuge, protégée par une palissade. A l’entrée du site, restent les vestiges de ce qui a pu être un fossé de part et d’autre du chemin d’accès. 

Il y a d'autres tucos sur le territoire de Castex, le tuco d'Autefage ou le tuco de la Goutilhe, mais ces deux derniers sont en retrait du coteau, donc avec un horizon moins dégagé.  

Mais le 10ème siècle c’est aussi l’aboutissement de trois siècles qui ont vu la transformation progressive de la société antique en la féodalité.

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