03-03 De l'origine de Castex

Publié le 23 juillet 2025 à 17:48

Aucun document ne permet de décrire la réalité de l’origine du village de Castex. On propose donc l’interprétation d’une origine vraisemblable sur la base de rares indices.

 

Le nom du village de Castex, issu de Casteth ou Casteths en gascon, n’est pas un mot d’origine latine, comme Sadeillan, ni d’origine wisigothe comme Troncens. Ce n'est pas non plus le patronyme d'un seigneur. Le village n'a pas non plus donné son nom à un seigneur. Casteths est un mot gascon signifiant " château" ou " fortification".

Or les fortifications, les maisons fortes, datent au mieux du 10ème ou du 11ème siècle. Alors Castex, ne serait-il qu'un village neuf, une communauté neuve fondée au 10ème ou au 11ème siècle ? Cela semble peu probable. Dès avant la conquête romaine le territoire qui deviendra celui de Castex est traversé par la Ténarèze, le Chemin de César, dont on a déjà parlé.

 

Si le village avait été fondé au cours de la période "vasconne", entre 6ème et 8ème siècle, peut-être serait-il connu aujourd’hui sous une dénomination d’origine gasconne antérieure à la période féodale. La plupart des villages alentours ont des noms d’origine gasconne : Sarraguzan (traduit du gascon par la colline pointue), Bernadets-Debat (traduit par la petite aulnaie du nord), Forcets (autrefois prononcé hourcets, traduit par le petit bois, ou le bosquet), Mazerolles (traduit par les masures). Si tel avait été le cas, Castex aurait vraisemblablement conservé un nom gascon à moins d'une évolution de configuration importante. Alors, avant de s’appeler Casteths, le village d’origine avait-il un nom d’origine gallo-romaine ?

 

Du fait qu'aucune trace n'a été retrouvée permettant de connaitre l'origine de Castex, il faut l'imaginer avec le peu d'éléments en notre possession. Pour cela on s’appuiera sur des vestiges gallo-romains trouvés à Sarraguzan et sur la topographie des chemins tels qu’ils pouvaient exister au temps de la Novempopulanie.

 

Au temps de la Novempopulanie

On ne sait rien du peuplement éventuel du territoire de Castex avant la conquête romaine. Des fouilles archéologiques ont mis au jour des traces d'un peuplement paléolithique plus au nord, sur le futur territoire de la bastide de Miélan. Il est probable que des implantations d’Aquitains antérieurs à la période gallo-romaine existaient tout au long de la Tenarèze, mais il n’y ni vestige d’oppidum, ni vestige de village.

 

Aux premiers siècles de l'ère chrétienne, la DRAC Occitanie compte 28 sites en Astarac en relation avec des villas gallo-romaines. Il y aurait eu dans les environs du futur Castex plusieurs villas et sans doute des colonies en dépendant. Sadeillan serait un village issu de la villa d'un Sadellanus, le village d'Antin issu de celle d'un Antinus. On a trouvé à Sarraguzan des traces d'une implantation gallo-romaine, et l’on sait qu’aux 12ème – 13ème siècles, le seigneur de Sarraguzan possédait une vaste seigneurie incluant des territoires entre le Bouès et l’Osse. Il y avait donc peut-être sur le territoire de Sarraguzan un aristocrate gallo-romain qui s’était fait construire une maison à la mode romaine, qui exploitait plusieurs colonies, et dont les descendants devinrent plus tard seigneurs de Sarraguzan.

"Au-dessus de la porte d'entrée de l'église de Sarraguzan se trouve un panneau sculpté en marbre blanc avec des pilastres cannelés sur les cotés et un entablement torsadé reposant sur des chapiteaux ouvragés. Ce vestige gallo-romain provient du cimetière au pied de la motte castrale de Sarraguzan, où d'autres vestiges gallo-romains ont été trouvés. La croix centrale est moderne." (D’après l'abbé Cazauran dans les notes du cartulaire de Berdoues)

 

D'autres villas plus ou moins riches se trouvaient dans les plaines fluviales proches de l'Arros, de la Baîse, et de l'Osse. La Tenarèze était une voie de "grand" passage, et ces villas étaient par ailleurs reliées par des chemins secondaires, chemins de serres sur les crètes, et chemins de traverses d’Est en Ouest à travers les coteaux.

Dans le secteur de Castex, la Ténarèze passe à Bassoues, Saint-Christau, Laas, Miélan, Castex, Bernadets-Debat, Lapeyre, Vidou, puis se dirige vers Capvern et la vallée de la Neste. De Bassoues à Miélan l'actuelle route départementale RD156 suit à peu près son ancien tracé. On l’appelle à Laas et à Miélan le chemin de César.

 

Par contre, entre Miélan et Bernadets-Debat, la route départementale RD3 qui traverse Castex, est un tracé qui serait postérieur au 14ème siècle. On en verra la raison dans un article à venir. L’abbé Cazauran, toujours dans les notes du cartulaire de Berdoues, nomme "l’ancien chemin de Miélan" un chemin vicinal situé environ 300 mètres à l’Est de la route RD3. Cet ancien chemin ne serait autre que le tracé originel de la Tenarèze. Il longe la petite chapelle de Forcets, fait un coude en direction de l’ouest à la limite entre les communes de Miélan et de Castex, puis immédiatement après un second coude en direction du sud, et s’évanoui 180 mètres plus loin. Le "Chemin de César", comme on l’appelle à Castex, reprend environ 2 km plus loin, en direction du sud, à partir d’un chemin Est-ouest appelé le chemin du Moulat. Sur la commune de Bernadets, ce chemin est nommé "chemin Vieil". Le tracé de la Tenarèze est donc interrompu en traversant la partie nord de la commune de Castex. Quelques limites de parcelles sur le cadastre dit de Napoléon daté de 1830 permettent de reconstituer approximativement les deux kilomètres manquants de la Tenarèze d’origine. C’est à partir de cette reconstitution que l’on va imaginer le scénario des origines de Castex.

En haut le tronçon manquant de la Tenarèze - En bas la reconstitution hypothétique - La limite inférieure est la route RD3 de Miélan à Trie

(Sur le Cadastre de Castex de 1830)

En dehors de la Tenarèze, il faut imaginer une serrade nord-sud dans la vallée du Bouès, depuis au moins Aux au nord, et Antin et au-delà au sud, et une seconde serrade au-dessus de l’Osse, de Sarraguzan au sud, jusqu’à Sainte-Dode en passant par Sadeillan, puis, plus au nord, vers Bazugues et Saint-Maur. Au niveau de Sainte-Dode elle aboutissait à un lieu que les gens appellent aujourd’hui "le camp de César". Aucun camp de légion romaine ne s’y est jamais trouvé. La topographie montre néanmoins que ce lieu a pu être aménagé, voire fortifié dans des temps reculés. 

 

Ces serrades nord-sud, et la Tenarèze, étaient reliées entre elles par des chemins "de traverse", est-ouest : Sarraguzan - Mazerolles et Antin, Maumus - Estampures, Sadeillan - Estampes, Sainte-Dode - Castelfranc et Aux-Aussat-Lannefrancon.

Les premières colonies

Entre les 2èmes et 3èmes siècles, la Tenarèze reste la voie principale de circulation nord-sud du sud de l’Astarac. Les serrades, beaucoup plus tortueuses, ne sont utilisées que pour des déplacements locaux.

 

Si on se fie aux vestiges gallo-romains de Sarraguzan, on peut imaginer que le propriétaire aristocrate de la villa qui se trouvait sur le lieu où plus tard sera le village de Sarraguzan, a partagé sa propriété entre plusieurs colons qui formeront plus tard les villages et hameaux de Bernadets-Debat, Castex, Forcets, Lazies. Et ces colonies auraient été implantées très naturellement au croisement des chemins de traverse et de la Tenarèze. On verra plus tard que la seigneurie de "Miélan" jusqu’à celle de Bernadets-Debat étaient vassales de la seigneurie de Sarraguzan dès les premiers temps de la féodalité.

 

Ainsi le premier habitat du village de Castex des origines se serait implanté au croisement de la Ténarèze et du chemin de traverse Maumus-Estampures. Une terre a pu y être allouée à un ou à deux colons aquitains ou gallo-romains, dont les noms ont été perdus depuis longtemps.

Si on fait l’hypothèse que le chemin qui descend le coteau du Bouès vers Estampures n’a pas évolué avant le 19ème siècle, le premier chemin de Maumus serait le chemin du Moulat. Les terres d’un premier colon ont pu être concédées au sud du chemin de Maumus-Le Moulat, celles d’un second au nord de ce chemin. On parlera ainsi du colon "du Midi" et du colon "de Douat" (du nom donné plus tard à un groupe de maisons situé à cet endroit). Leurs maisons et les masures de leurs domestiques et affranchis, ou de leurs obligés, ont été élevées le long des deux chemins, les unes coté nord, les autres coté sud. Elles ont formé peut-être le premier hameau du futur village de Castex.

On a vu dans l’article 03-02 que la christianisation de la Gascogne avait débuté à la fin du 4ème siècle. Une hypothèse voudrait qu’une chapelle primitive ait été construite entre la fin du 4ème siècle et le 5ème siècle sur une parcelle appelée encore au 17ème siècle Seindie (traduit par Saint-Dieu), située exactement au croisement de la Ténarèze et du chemin du Moulat.

Il est impossible de connaitre l'intensité du peuplement à l'époque, ni l’étendue des terres en culture par rapport aux surfaces boisées ou en landes et friches. Il ne reste rien des structures de cette époque. Aucun artefact d'origine gallo-romaine n'a été trouvé sur le territoire de Castex. Aucun toponyme du territoire de Castex n'apparait avec une origine latine ou antérieure. Cela ne signifie pas que ce territoire était vide d'hommes.

Un nouveau colon barbare

A Castex, tous les toponymes que l'on trouve dans le livre terrier de 1729 ou dans la reconnaissance féodale de 1778 sont d'origine gasconne, donc au mieux du 8ème siècle, sauf un. Un des quartiers de Castex porte en effet aujourd'hui le nom de Gignoux. Jusqu'au premier tiers du 20ème siècle on écrivait non pas Gignoux, mais Ginoux, et au 18ème siècle Ginoux ou Ginous, prononcé Ginouss, ou Ginoush.

 

Or le mot de Ginoux n'est ni d'origine latine, ni d'origine gasconne. Selon les linguistes, Ginoux est formé à l’origine des mots Genos (de la famille de -) et Wulf (Loup), qui a donné le nom de Genulphe (« u » prononcé « ou », donc Génoulfé). C’est un nom de personne, de racine celto-germanique, donc wisigothe ou franque. Le mot Genulphe a ensuite évolué en Genou, puis en Ginoux.

 

On peut alors imaginer qu'au 5ème siècle, le propriétaire gallo-romain dont la villa se trouvait sur le futur territoire de Sarraguzan, a pu allouer une partie du futur territoire de Castex, au nord des terres des deux premières colonies, à un colon wisigoth appelé Genulfe. La propriété de ce Genulphe a pris le nom de A Genoulfe, peu à peu "simplifié" en Genous, puis en Ginoux.

S'il en est ainsi, Ginous a pu former un second hameau sur le territoire de Castex, et le nom de Ginoux pourrait être la trace la plus ancienne du village de Castex. On verra alors plus loin pourquoi et comment le village a pris plus tard le nom de Castets ou Casteths.

Le village de Castex se développera ensuite au Moyen-âge, formant quatre "quartiers" : le quartier du midi, avec pour origine la colonie du Midi, le quartier de Ginoux, le quartier du château, plus tard de l’église, au milieu des deux précédents, et enfin le quartier du nord. L’origine du quartier nord est plus difficile à expliquer. Une hypothèse sera proposée dans un article à venir.

Il n'y a évidemment aucun moyen de vérifier ces hypothèses, qui ne sont que spéculations.

 

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