Conférence du 7-12-2025 : les forgerons

Publié le 13 décembre 2025 à 20:08

Deux conférenciers se sont exprimés le 7 décembre :

        Marc Bégué avec pour sujet la vie et la transformation du village de 1800 à 1914

        David Spindler avec pour sujets les forgerons, puis les tisserands et tailleurs de Castex du 17ème au 20ème siécle

Cet article reprend le premier sujet exposé par David Spindler

Les forgerons du village

Le forgeron en gascon se dit Hau ou Fau, et la forge Hauré. En français ancien, c’est Faure, autrement dit le même mot. Le patronyme Faure, c’est le forgeron.

Il y avait un forgeron dans tous les villages de Gascogne depuis qu’il y a des villages.

Jusqu’au milieu du 19ème siècle, le forgeron dans les villages travaille le fer. Aujourd’hui ce qu’on appelle l’acier doux, c’est du fer. L’art du forgeron consistait à transformer le fer en l’acier parfait pour l’usage qu’il voulait en faire : lames de couteaux, lames de scies, lames de haches. L’acier c’est du fer avec un peu de carbone, ni trop, ni trop peu, autrefois du fer martelé à chaud, plongé dans l’eau ou l’huile du bac de trempe.

Au Moyen-âge le fer des forgerons de Castex venait du comté de Foix, obtenu dans des bas-fourneaux où l’on faisait brûler un mélange de minerais de fer concassé et de charbon de bois. A partir du 16ème siècle de nombreuses forges minières se sont ouvertes dans la vallée d’Aure. On utilisait des moulins hydrauliques sur les rivières pour faire tourner des Moulines. Les Moulines actionnaient les soufflets des forges et des marteaux de martelage pour épurer le produit des bas-fourneaux. Toutes les forges minières des vallées pyrénéennes ont fermé au 19ème siècle lorsque l’industrialisation des aciéries a débuté.

La forge traditionnelle de village, c’est un feu de charbon de bois, un soufflet, une enclume, un bac de trempe, des tenailles et des marteaux, enfin une meule pour aiguiser les lames. Au Moyen-âge il y a deux soufflets que l’on actionne alternativement pour entretenir un feu continu. Plus tard et jusqu’au début du 20ème siècle le soufflet de forge avait deux poches et un système de soupapes qui permettait de souffler en continu.

Un soufflet de forge du 19ème siècle

Une forge au Moyen-âge

Au Moyen-âge dans les villages, la forge est banale, c’est-à-dire propriété du seigneur et d’usage obligatoire pour les tenanciers du village. Le forgeron ne forge pas d’épées de chevaliers, mais les outillages des laboureurs (socs d’araires, lames de houes, …), des bucherons (haches, scies, cognées, …), et couteaux, serpes, faucilles et des outils de travail du bois. Le fer est rare et cher.

 

Ci-contre un araire avec son soc au musée du Paysan Gascon de Toujouse

A la Renaissance, il y a davantage de fer. La forge s’est libérée de la tutelle seigneuriale. Une charrue primitive à coutre et versoir a remplacé l’araire, des appareillages ménagers font leur apparition : trépieds, chenets et crémaillères dans la cheminée, pentures de portes et volets. Des marchands proposent des objets en fer sur les marchés.

Ci-contre une charrue simple à mancheron unique au musée du Paysan Gascon de Toujouse. Une crémaillère et un trépied de cheminée

Au 18ème siècle de nouveaux artisans se sont installés au village : menuisiers, charpentiers, cordonniers, sabotiers, charrons. Le forgeron travaille pour eux, fabrique et surtout entretien leur outillage. Le forgeron est aussi maréchal-ferrant. Une activité importante du forgeron est le cerclage des roues fabriquées par le charron. A l’époque tout le travail de préparation du cercle d’acier était bien sûr manuel.

Cerclage de roues au début du 20ème siècle

(extrait d'une carte postale ancienne)

Mestier (on dit aussi travail) de maréchal-ferrant

Ancienne forge du village d'Antin

A Castex, depuis peut-être le milieu du 17ème siècle et jusqu’en 1798, dans une des nombreuses familles Cougot du village, on était forgeron de père en fils. Le dernier forgeron de cette famille est décédé en 1798. Leur forge était au carrefour de la route de Miélan et du chemin de Maumus. Un autre forgeron originaire de Mazerolles s’était installé au nord du village, mais ses enfants n’ont pas poursuivi le métier.

Durant tout le 19ème siècle, il y a eu deux forgerons à Castex. Un des fils de l’ex-métayer du comte de Béon, seigneur de Castex, a pris la succession du dernier des forgerons Cougot, puis son fils jusqu’en 1873. Une nouvelle forge a été bâtie au sud du village par Pierre Demun, originaire d’Estampures. Elle a fonctionné de 1848 jusqu’en 1897, année du décès de son fils Louis.

La dernière forge de Castex était celle de Georges Sarrat. Elle avait été fondée en 1884 par Jean Darré, originaire de Burg. Jean Sarrat, le père de Georges, originaire d'Avezac, s'était marié en 1918 avec la fille de Jean Darré. Depuis la fin du 19ème siècle, le forgeron était devenu revendeur et réparateur de machines agricoles, ferronnier, serrurier. Jean et Georges Sarrat étaient également maréchal-ferrant. A partir du milieu du 20ème siècle le soufflet de forge devient électrique, et le forgeron équipe sa forge de machines, en premier lieu d’un marteau pilon. Des roues de charrettes ont été cerclées dans la forge Sarrat jusqu’à la fin des années 60. Cette forge a cessé de fonctionner à la fin des années 70.